Lettre du 2 Octobre 1888 à Eugene Boch
par Vincent van Gogh
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Lettre du 2 Octobre 1888 à Eugene Boch
par Vincent van Gogh
Mon cher ami Boch,
Merci bien de votre lettre qui m’a fait bien plaisir.
Je vous en félicite de ne pas avoir hésité cette fois-ci – et d’avoir attaqué le Borinage.
Voilà un champ où vous pourrez travailler votre vie durant tant le paysage extraordinaire que la figure.
Les scloneusesa en loques de fosse sont surtout superbes.
Si vous allez jamais au Petit Wasmes voulez vous vous informer si Jean Baptiste Denis (cultivateur)
et Joseph Quinet (charbonnier) y vivent encore
et leur dire de ma part que je n’ai jamais oublié le Borinage
et que j’aurais toujours encore envie de le revoir.
Maintenant j’ai à vous raconter du neuf
c.à.d. que j’ai enfin meublé la maison
et que j’ai de suite meublé une chambre à coucher pour Gauguin aussi ou pour quiconque viendra.
La maison est bien plus gaie maintenant qu’elle est meublée.
Après j’ai travaillé d’arrache pied car l’automne est sans vent et superbe.
Aussi ai je en train 7 toiles de 30 carrées.
Tout d’abord le café de nuit où j’ai logé, avec effet de lampes – peint la nuit.
En voici une de ces vues.
Un buisson de cyprès ou de Cèdre en boule d’un vert bouteille.
Dans le gazon vert citronné.
Derriere une rangée de lauriers roses et 2 figurines.
Un ciel bleu de cobalt cru.
Vous voyez que c’est encore bien plus simple qu’auparavent.
Puis des terres labourées, un paysage avec rien que les mottes de terre,
les sillons couleur d’un vieux sabot sous le ciel myosotys avec des flocons blancs.
Puis une vue de ma maison et de l’entourage ensoleillé de souffre, le ciel cobalt dur et clair.
Cela c’est d’un difficile!
Puis une vue du café sur la Place du forum où nous avions l’habitude d’aller, peint la nuit.
Puis enfin une etude du Rhône, de la ville eclairée au gaz et se refletant dans la rivière bleue.
Avec le ciel etoilé dessus – avec la Grande Ourse –
à scintillement rose et vert sur le champ bleu de cobalt du ciel nocturne tandis
que la lumiere de la ville et ses reflets brutals sont d’un or rouge et d’un vert bronzé.
Le jardin aux lauriers roses et au buisson en boule est empâté comme de la barbotine.
Votre portrait est dans ma chambre à coucher avec celui de Milliet le zouave que je viens de faire.
Je voudrais bien vous prier de me faire un échange d’une de vos etudes des charbonnages.
attendez, je vous enverrai de mon côté d’abord une étude alors,
queb je serai sûr que cela en sera une qui vous paraitra tout inconnue.
Car si vous voyiez les études de nuit vous aimeriez peut etre mieux cela que les etudes de soleil.
Enfin laissez moi faire.
Car j’espère bien que nos rapports une fois commencés dureront toujours.
Car tout ce que vous ferez va m’interesser extraordinairement
puisque j’aime tellement ce triste pays du Borinage qui toujours me sera inoubliable.
Si je viens à Paris l’année prochaine alors je suis à peu près decidé de pousser jusqu’à Mons.
Et peutetre jusqu’à mon pays pour y prendre des endroits connus d’avance.
Ainsi dans le Borinage Marcasse ou St Antoine au Petit Wasmes.
Et puis la cour de l’Agrappe chez vous à Frameries.
C’est en somme dans le Borinage que j’ai pour la première fois commencé à travailler sur nature.
Mais naturellement tout cela je l’ai depuis longtemps détruit.
Mais cela me remue le coeur qu’enfin tous ces endroits vont être peints.
Vous allez voir comme les idées vous viendront.
Je vous ecris très à la hâte mais je voulais répondre de suite.
Ci inclus un bien mauvais croquis de la nuit etoilée.
Tous ces tableaux sont des toiles de 30 carrées.
Eussiez vous resté ici jusqu’à présent vous auriez remporté d’autres etudes.
Car je vous dis, la nature a été extraordinairement belle.
J’ai plus d’une fois fait une toile de 30 dans la journée mais alors c’etait que dès le matin
jusqu’au coucher du soleil je n’ai bougé de la seance que pour manger un morceau.
Mon frère m’a écrit qu’il vous avait vu en passant.
Eh bien l’année prochaine j’espère bien que nous nous reverrons,
n’oubliez surtout pas de m’écrire votre adresse si vous changiez de place
ou de me donner au juste votre adresse permanente,
à la Louvière si j’ai bonne memoire.
Car cela sera excellent de travailler avec continuité dans les charbonnages
et puis,
pour voir tout autre chôse,
venir au pays des lauriers roses et du soleil de souffre.
Est ce que votre soeur va faire les charbonniers aussi.
Il y a bien là du travail pour deux.
J’estime qu’il soit bien heureux pour vous que vous soyez à deux
pour faire de la peinture dans votre maison.
Eh bien je dois aller travailler dans la vigne près de Mont Major.
Elle est toute pourpré jaune vert sous le ciel bleu, un beau motif de couleur.
Bonne poignée de main et bon courage et bien du succes pour le travail.
t. à v.